Planète à Louer, de Yoss

Planète à Louer (Se alquila un planeta)

de Yoss

Mnémos (2011)
Première parution VO en 2002
265 pages

Yoss est un auteur cubain de science-fiction. Il est né en 1969 à La Havane où il réside toujours.

Synopsis

« Toute ressemblance entre la Cuba des années 1990 et cette Terre du XXIe siècle est purement intentionnelle. »

Dans un futur indéterminé, une guerre nucléaire totale est sur le point d’éclater. Afin de sauver la Terre, des extraterrestres en prennent possession. Ils y imposent des règles draconiennes visant à rétablir l'équilibre écologique. Un siècle plus tard, notre planète est redevenue un paradis, un « monde souvenir », où les riches xénoïdes viennent faire du tourisme. Mais derrière l’image d’Épinal, les conditions de vie des Terriens sont loin d’être idylliques. Buca, la prostituée, Moy, l’artiste métis ou Alex, le scientifique de génie, tous n’aspirent qu’à une seule chose : fuir… partir…s’exiler… quitter la Terre… par tous les moyens !

Mon avis

Une nouvelle découverte sympathique dans le cadre de l'ABC de l'Imaginaire que ce roman chorale. Sept nouvelles se succèdent ainsi, chacune précédée d'un court avant-propos se focalisant sur une des particularités de la société. Sept textes indépendants donc, mais qui sont reliés l'un à l'autre par le biais de liens entre les personnages que l'on se plait à deviner. La diversité ne touche pas seulement les protagonistes puisque l'auteur joue également avec beaucoup de brio avec les styles de narration. Monologue, entretiens, omniscience et première personne s'entremêlent ainsi et apportent des variations toutes bienvenues.

On suit donc une galerie riche de personnages très captivants. De la travailleuse sociale (comprenez prostituée) à l'orpheline en passant par les scientifiques, sportifs, policiers, artistes et petites frappes, tous ont leurs souffrances et leur point de vue sur la société dans laquelle ils évoluent. Impossible de ne pas s'attacher à eux et d'espérer à chaque fois qu'ils trouvent ce à quoi ils aspirent : l'évasion, quelle que soit sa forme. Ce sont des textes très fort que Yoss nous propose ici, parfois émouvants, parfois trashs, parfois palpitants (je n'ai jamais autant vibré pour un événement sportif ^^), et toujours toujours très prenants.

Mais si chaque nouvelle permet d'explorer un personnage c'est aussi, et surtout, l'occasion d'étudier un nouvel aspect de cette humanité malmenée et à travers elle la société cubaine. Corruption, tourisme sexuel, fuite des cerveaux … tout y passe, même si Yoss évoque quand même les quelques réussites comme les systèmes d'éducation ou de santé. Les situations sont certes présentées sous forme romancée, mais on ne peut s'empêcher de chercher des parallèles assumés par l'auteur. N'allez pourtant pas croire avoir à faire à un brûlot enflammé. Point de de militantisme primaire ici, l'auteur joue clairement la carte de l'imaginaire avec une SF très riche. Il dénonce sans moralisation et présente des causes surtout externes personnifiées par ces puissances extraterrestres qui maintiennent la Terre dans sa misère par le biais d'un embargo.

Un corpus très prenant de nouvelles liées entre elles par des personnages riches. L'auteur joue avec intelligence la carte de l'imaginaire pour nous offrir un aperçu poignant de la société cubaine des années 90.